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Photo du rédacteurDominique Jacques ROTH

Quand la jouissance s'en mêle


Aliéné au signifiant, le désir est orienté par le langage et la parole, mais Freud évoque un au-delà du principe de plaisir, que Lacan appelle « jouissance », comme l’incidence d’un affect satisfaisant la pulsion de mort. Lieu de méconnaissance, l’inconscient est une force d’attraction de représentations plus ou moins tenaces telles que : « la chute de l’URSS est la plus grande catastrophe du XXe siècle » ou « il est inenvisageable que les Ukrainiens puissent faire le choix de vivre libre ». L’inconscient fonctionne selon le principe de jouissance, point nodal d’un savoir défaillant où le sujet jouit et ne veut rien savoir de plus.

Spécialiste de l’oxymore, le président Poutine prétend assurer la paix en faisant la guerre. A son sujet, il a souvent été question de paranoïa - à entendre comme un délire de persécution doublé d’un délire de certitude-. Entrevoir le problème par le prisme de la jouissance (au sens analytique) se produit plus rarement. Si la névrose est organisée par une jouissance perdue quand le désir se projette vers une complétude impossible à atteindre, tel n’est pas le cas dans la psychopathie ou la psychose.

Pour les psychopathes et autres génocidaires, il y a une jouissance du crime qui fait norme. La jouissance se justifie par elle-même, sans référence éthique. Produite par un coup de force qui maintient la méconnaissance en se référant à l’Un d’une frustration, elle peut dépasser la mesure. Entre satisfaction et pulsion de mort, cet affect délétère est pris dans l’anneau du réel. Au sein même du langage, elle s’exprime sans retenue quand Moscou considère les sanctions dont elle écope comme la manifestation de l’impuissance occidentale ou quand un chef de guerre se demande à quoi bon le monde s’il n’y a pas de place pour la Grande Russie, créditant l’hypothèse gigacide dès lors qu’elle convoque la composante nucléaire... Cette jouissance peut aussi trouver son acmé dans l’isolement, le pouvoir dictatorial s’exerçant le plus souvent seul.

La jouissance autorise qu’un discours puisse tourner en boucle, de manière totalement décomplexée. Jouissant de son symptôme, le dictateur tient l’Ukraine pour un pays fictif et les dirigeants ukrainiens pour « une junte de nazis drogués » à démilitariser, sans s’appliquer ce choix à lui-même. On parle avant de penser, pour jouir plus que pour dire, disait Lacan. Mais le symptôme est aussi un trait qui peut faire boiter et qui interpelle quelques autres, disons un petit tiers des pays que compte le monde, condamnant l’intrusion russe en Ukraine.

Au-delà de la joie trouble qui satisfait les intérêts pulsionnels, la jouissance désigne l’inhibition de la pensée au regard de l’objet impossible de la satisfaction. Le désir en principe, vise la jouissance en l’évitant, car aller jusqu’au bout de la jouissance peut détruire le corps. Il y a toujours en effet, un point d’inquiétude par rapport à la jouissance qui rencontre et renforce la frustration. Il serait salutaire pour le monde que les tyrans recouvrent la raison car une jouissance dépassant les bornes peut devenir un fruit mortel. Certains dictateurs (Hitler, Kadhafi, Saddam Hussein) ont franchi le stade de la satisfaction pour éprouver leur corps au-delà d’une certaine limite dans les derniers moments de leur existence...


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